Où atterrir ? est une expérimentation artistique, scientifique et politique
qui propose a des citoyen·nes, des agent·es de la fonction publique et des élu·es de mener l'enquête sur leur terrain de vie à partir de leurs attachements : ce à quoi ils tiennent et qui les fait tenir.
Carnet d'atterrissage
Le Collectif Rivage, créé à Bordeaux en 2020, réunit des artistes et des scientifiques.
Carnet d'atterrissage
A la manière d'un carnet de bord, l'équipe du Collectif Rivage a documenté le bourgeonnement de l'expérimentation "Où atterrir ?" entre 2021 et 2023.
Atelier 8
Se relier et tisser des intérêts communs
Où atterrir ? est une expérimentation artistique, scientifique et politique
qui propose a des citoyen·nes, des agent·es de la fonction publique et des élu·es de mener l'enquête sur leur terrain de vie à partir de leurs attachements : ce à quoi ils tiennent et qui les fait tenir.
La démarche associe les pratiques artistiques et cartographiques aux méthodes d'enquêtes pour redéfinir le territoire à partir des dépendances et revitaliser le cercle politique dans un contexte de mutation climatique.
1 — accueil convivial des participant.es
> 15 min avec toute l’équipe
Autour d’une boisson avec des biscuits ou des fruits pendant lequel on échange et on se met à l’aise avant de commencer l’atelier.
2 — présentation du programme de l’atelier
> 10 min animé par Maëliss Le Bricon
+ Pendant cet atelier, nous allons poursuivre le travail de description pour identifier et être plus attentif à la présence des acteurs vivants non-humains qui peuplent nos terrains de vie. Les enquêtes commencent à être assez avancées pour que nous puissions également voir quelles sont les relations de proximité ou de superposition qui nous relient les un.es aux autres. Nous expérimentons une première version du protocole jeu de ficelle en fin d’atelier pour rendre visible ces liens.
3 — cercle des prénoms
> 3 min animé par Maëliss Le Bricon
+ Une première personne sonorise son prénom avec un geste.
+ Tout le monde reprend, en même temps et le plus précisément possible, le geste et le prénom de la première personne.
+ On recommence pour chacun.e jusqu’à boucler le cercle des prénoms.
4 — mise en corps et voix et partage des concernements
> 15 min animé par Séverine Lefèvre
+ On commence par faire un étirement-concernement :
-
On se frotte les mains.
-
On imagine qu’au centre de notre paume de main droite, il y a notre concernement. C’est comme si on avait un plateau, avec dessus notre boussole et nos post-it posés.
-
Une première personne propose un mouvement avec son plateau : au-dessus de sa tête en faisant un grand cercle avec des rotations, en veillant à ne pas faire tomber son plateau.
-
Elle le fait ensuite passer sur la main gauche et le transmet à son/sa voisin.e de gauche en annonçant son concernement à voix haute. Par exemple : “la contemplation, sous-titre : une pratique à défendre, du temps de qualité pour apprendre, lire, partager, penser”.
Tour des concernements :
La contemplation, sous-titre : une pratique à défendre, du temps de qualité pour apprendre, lire, partager, penser - Ma liberté de vivre déconnectée et de pouvoir naviguer en confiance - Ma liberté de grandir dans ma famille - Le type d’alliances qu’on peut faire avec l’invisible pour changer le monde - Mes soutiens - La considération de l’artiste dans notre société - Le sentiment d’intérêt général dans mon métier d’architecte-urbaniste - La fraternité, l’absence l’oubli dans notre société de cette valeur fondamentale - Le droit de vivre dans une société sans pollution électromagnétique - La prévention santé pour tous et la prise en compte de l’interdépendance et de la démocratie - La communication vraie avec mon entourage - L’accès à l’information sur l’eau potable et la capacité d’agir du citoyen - Le droit de vivre dans une société sans contrôler, sans être contrôlé à des fins commerciales, politiques et sanitaires - La relation au vivant et aux vivants dans mon quartier - La prise de décision collective dans nos institutions pour co construire demain - La création et le maintien d’espaces bienveillants pour une communication et un relationnel sain - Mon job à Bordeaux - Mon bien-être personnel et professionnel - Une nourriture saine, gratuite, durable, pour tous et pour toutes, dans la confiance, en milieu urbain, à moins de 300 mètres de son lieu de vie et/ou d'activité - Le respect de la personne chez celles et ceux qui ont de l’endométriose
5 — écho dans la montagne
> 5 min animé par Valérie Philippin / Maëliss Le Bricon
+ L’artiste-médiatrice joue le rôle de la bergère et se place face à un demi-groupe de participant.es, comme si elle était face à une montagne. Elle propose une forme vocale improvisée courte (avec peu d’éléments différents) et le demi-groupe répond en écho, deux fois ou trois fois. Elle propose de grands contrastes entre chaque proposition. Pendant ce temps, l’autre demi-groupe écoute en face, les yeux fermés.
+ Puis on alterne les groupes, la bergère se retourne et propose une forme vocale à l’autre demi-groupe. On alterne action et écoute, deux ou trois fois avec chaque groupe.
+ Si on a le temps, on propose à qui veut faire le berger ou la bergère.
L’idée c’est l’écho : reproduire c’est faire la même chose, et imiter c’est s’approprier. L’important n’est pas de reproduire à l'identique, mais de voir comment on peut tous.tes s’emparer d’un son, comment on recompose quelque chose ensemble qui fait écho.
6 — pensée en action : se rendre sensible pour sortir de la sidération
> 15 min animé par Maëliss Le Bricon
On se retrouve en cercle pour partager 3 extraits d’ouvrages en lien avec l’expérimentation “Où atterrir ?” que nous traversons ensemble :
+ Isabelle Stengers, philosophe belge, collabore depuis très longtemps avec Bruno Latour. Philippe Pignarre raconte dans “Latour - Stengers, un double vol enchevêtré” cette histoire.
Avec les membres du Collectif Rivage, on s’est retrouvé autour de ce passage extrait de “Résister au désastre”.
“Certains ricanent et disent qu’il est trop tard, mais ce qui nous attend n’est pas un big flash, comme peut l’être une déflagration atomique, une fin du monde brutale et instantanée, un rideau qui tomberait, ignorant les possibles qui poussent un peu partout. Non, quoi qu’il arrive, ça va se déglinguer pendant des siècles, et ça ne va pas être drôle. Mais c’est avec cela qu’il faut penser par le milieu. Alors ma hantise c’est : que peut-on fabriquer aujourd’hui qui puisse éventuellement être ressource pour celles et ceux qui viennent ?”
Isabelle Stengers
Ce que nous fabriquons ensemble, ce sont des outils, des dispositifs, des protocoles qui puissent servir à l’action publique dans un contexte inédit de mutation climatique. À ce stade, les hypothèses d'Où atterrir ? sont encore en cours d’expérimentation. On espère pouvoir les valider ensemble pour ensuite les essaimer et qu’elles puissent servir à un plus grand nombre de personnes. Ce que nous testons ensemble jusqu’en juin 2023 servira, nous l'espérons, à d'autres acteur.rices qui souhaitent atterrir.
+ L’autre dimension qui nous tient particulièrement à cœur dans l’expérimentation, ce sont les effets du dispositif sur la sidération, souvent créée par les enjeux écologiques. Vinciane raconte au sujet de l’expérimentation “Où atterrir ?” :
“Le premier virus qui nous menace, c’est la sidération par rapport à l'ampleur de la catastrophe qui est en train de nous arriver.
Qu’est-ce qui nous arrive ? Ça veut dire que c’est déjà arrivé et que c’est encore en train d’arriver. Le virus de la sidération nous paralyse terriblement. Et c’est justement le travail de Bruno Latour et Chantal Latour : comment on va lutter contre cette sidération ? Comment est-ce qu’on va aussi repolitiser cette question de cette urgence climatique, de cette catastrophe qui est en train de nous arriver ?”
Vinciane Despret
C’est exactement pour cette raison que nous articulons les différents médiums et que nous travaillons avec les arts, à partir de nos matériaux sensibles, le corps, la voix, l’écoute, le regard... L’enjeu est de traverser les états de sidération qui nous paralysent et de s’équiper sensiblement pour agir.
+ L’autre dimension que nous mobilisons grâce aux outils issus des arts vivants, c’est la puissance des récits produits par les enquêtes. A chaque fois il y a des formes, des règles pour tenir l’auto-description, ce sont aussi des récits qui sont générés. L’ambition, c’est que ces récits traversent la sidération, et nous affectent pour révéler les attachements de chacun.e.
On parle parfois de contamination au sein des ateliers, parce qu’on sent bien qu’on a de plus en plus de scrupules liés aux concernements des un.es et des autres.
Vinciane écrit au sujet des récits dans la préface du livre “En plein vol” de Thom Van Dooren :
“L'extinction quand elle est pensée en chiffre ne touche pas, sidère, ça ne dit pas ce que c’était un éléphant, de ce qu'on va perdre dans notre corps, ça ne dit pas ce que le monde va perdre. Il faut trouver de nouvelles manières de penser les extinctions qui nous fassent comprendre ce qu’on perd. Quand nous perdons un être, nous ne savons pas ce que nous perdons. Les statistiques nous font croire que nous le savons et je trouve qu’il faut ouvrir l’imagination, quel est l’appauvrissement que subit le monde ? Quelles sont les histoires que se racontaient ces animaux ? Quelles sont les perceptions uniques qu’ils avaient sur le monde et qui l’enrichissaient ? Quels étaient les rapport qu’ils tissaient avec d'autres espèces et dont le monde va terriblement manquer une fois qu’ils seront disparus ? Quels sont les affects qui nous permettront de considérer cela et commencer à trouver cela inacceptable ? Les scientifiques et les écrivains font : les rendre importants pour nous en montrant simplement leur extraordinaire inventivité, leur beauté et que nous soyons touchés et émus (...).
Qu’est-ce qui est perdu lorsqu’une espèce, une lignée évolutive, une manière de vivre, une forme de vie ou une forme de la vie disparaissent du monde ? Ou, plus précisément lorsqu'une forme de vie se disloque, s’abîme, s’appauvrit, s’éteint ? Car l’extinction, nous rappelle Thomas van Dooren, n’est pas “quelque chose qui commence, se produit rapidement, puis se termine”. C’est un lent “effilochage de modes de vie intimement enchevêtrés”. Qu’est-ce qu’il arrive dans ces effilochages ? Qu’est-ce qui s’y vit, qu’est-ce qui s’y perd ? Et surtout, qui perd quoi et comment ?”
7 — vivre avec les vivants non-humains
> 40 min animé par Maëliss Le Bricon
+ Nous poursuivons l'enquête en s'entraînant à décrire et à repérer les acteurs non-humains qui peuplent notre terrain de vie. Chacun.e cartographie pendant 15 minutes les vivants non-humains selon les réponses au questionnaire suivant :
-
Quels sont les vivants non-humains que j’ai rencontrés au cours de la semaine ?
-
On les place en fonction de l’intensité de la rencontre (plus elle est proche du centre, plus la rencontre est intense ; plus c’est loin du centre, moins la rencontre est intense). Une rencontre, ça peut être compris comme chacun.e le souhaite.
+ On forme des binômes pour que chacun.e puisse partager ses réponses et prendre le temps de décrire les rencontres avec les non-humains pendant 25 minutes.
“Il est étrange que les manuels de géologie ou de biologie s’émerveillent que “ par chance” les organismes vivants aient trouvé sur terre les conditions idéales pour se développer depuis des milliards d’années : la bonne température, la bonne distance d’avec le soleil, la bonne eau, le bon air. De la part de sérieux savants, on pourrait s’attendre qu’ils embrassent avec moins d’enthousiasme une version si providentielle de l'accord entre les organismes et leur “ environnement” comme ils disent. Le moindre devenir-animal mène à une tout autre vision, beaucoup plus terre à terre : il n’y a pas du tout d’”environnement”. C’est comme si vous fécilicitiez une fourmi pour la chance qu’elle a de se trouver dans une fourmilière si providentiellement bien chauffée, si agréablement aérée et si fréquemment nettoyée de ses déchets ! Elle vous rétorquerait sans doute, si vous saviez l’interroger, que c’est elle et les milliards de ses congénères qui ont émis cet “environnement” qui sort d’elles, comme la ville de Prague émane de ses habitants. Cette idée d’environnement n’a guère de sens puisque vous ne pouvez jamais dessiner la limite qui distinguerait un organisme de ce qui l’entoure. Au sens propre, rien ne nous environne, tout conspire à notre respiration. Et l’histoire des vivants et là pour nous rappeler ce que cette terre si “ favorable” à leur développement, ce sont les vivants qui l’ont rendue favorable à leur desseins - desseins si bien cachés qu’ils ignorent eux-mêmes tout à fait ! A l’aveugle, ils ont courbé l’espace autour d’eux ; ils se sont comme pliés, enfouis, roulés, pelotonnés en lui.”
Bruno Latour
8 — pensée en action : lettre de Vinciane Despret à sa chienne Alba
> 5 min animé par Maëliss Le Bricon
+ L’enjeu de ces protocoles est de nous rendre plus attentif à la présence des non-humains qui partagent nos terrains de vie. Lorsque nous enquêtons, nous découvrons que les vivants non-humains jouent un rôle important dans les problèmes que nous décrivons : virus, perturbateurs endocriniens, chauve-souris, la Garonne…
Vinciane Despret attire notre attention sur la place que nous laissons aux vivants avec une lettre écrite à sa chienne Alba qu’on propose de lire ensemble :
“Ma très chère Alba,
Tu ne liras évidemment pas cette lettre, l’écriture n’étant qu’un des innombrables points de divergence entre nos manières d’être et de communiquer— non que tu n’écrives pas, tu le fais à ta manière de chienne, mais je ne la comprends pas plus que tu ne comprends la mienne. Et ce n’est là qu’une des multiples différences de nos « vitalités expressives ». comme le dit Donna Haraway.
Je chéris chacune de ces différences entre nous, ces différences qui, par un très beau paradoxe, nous séparent et nous rendent proches, nous font nous sentir différentes l’une de l’autre et être différentes de ce que nous étions avant de nous connaître.
Parce que tu es une chienne, tu n’as pas pu m’accompagner hier à Beaubourg, à l’une des rencontres autour du thème « Avec qui venez-vous ? ». Ce n’est pas ta place. Mais c’est quoi la place des animaux ? En choisissant cette formule d’invitation “ avec qui venez-vous ?”, je ne savais pas que c’est le problème de la place qui allait, de manière récurrente, se poser.
Que le fait de ne pas être humain ne cessait d’être sanctionné par le geste de se faire remettre à sa place (ce qui plus précisément veut dire: se faire déplacer ailleurs).
Les agents d’accueil m’ont raconté que quantité d’animaux sont en fait entrés dans Beaubourg. Mais toujours clandestinement, en profitant des brèches dans les murs ou dans la sécurité.
Et le constat est le même partout : il y a de moins en moins de place pour d’autres êtres que nous. Notre monde devient un monde d’entre nous, comme on dit d’un monde d’entre soi.
L’historien du Moyen-Age Pierre-Olivier Dittmar m’a rappelé que le Paradis, je parle ici de la destination finale, était un lieu sans animaux.
Je crois ma chère Alba, que notre monde ressemble de plus en plus au Paradis. En fait, on y est presque, nous n’aurons pas besoin d’être morts pour y accéder.
Peut-être sommes-nous déjà presque un peu morts.
Alors je dois te remercier Alba, comme on remerciera tous les clandestins de Beaubourg, araignées, pigeons, souris, moustiques, bactéries, champignons, de nous avoir gardés, pour un temps encore, vivants.”
Vinciane Despret
9 — jeux de ficelles (version 1)
> 1h30 animé par Maëliss Le Bricon, Loïc Chabrier, Marion Albert et Séverine Lefèvre
La règle d’or : On ne donne jamais son opinion, on ne discute pas, on ne commente pas, on ne rebondit pas.
+ On forme des groupes de 4 personnes par table et on place nos boussoles sur les supports (les plaques de liège ou de carton). Chaque citoyen.ne-expert.e présente sa boussole pendant 15 minutes.
-
Chacun.e choisit une couleur de ficelles.
-
Un.e premier.e citoyen.ne-expert.e commence par présenter les entités de sa boussole, unes par unes. Pour chaque entité, elle donne l’action qui menace ou qui maintient : qu’est-ce que fait cette entité qui menace ou maintient mon concernement ?
+ Pendant ce temps, chaque participant.e écoute autour de la table la description du/de la citoyen.ne-expert.e, sans commenter ni donner son opinion. Il/ elle peut relier les entités de sa propre boussole aux autres entités quand il/elle identifie une relation de proximité entre les entités.
-
Si un.e participant.e identifie une relation entre deux entités qui lui semble proches ou voisines, il.elle se manifeste : “j’ai une entité voisine qui est proche de la tienne”. Il/Elle plante une aiguille sur chacune des entités et les relie grâce à la ficelle correspondante à sa couleur. Si le/la citoyen.ne-expert.e se sent aussi relié.e à l’entité, elle tisse un lien entre les deux aiguilles avec la ficelle correspondante à sa couleur. Si elle ne trouve pas de proximité entre les deux entités, elle ne fait rien.
-
Une relation de proximité peut être tissée dans un sens ou dans les deux sens.
+ Les participant.es peuvent aussi identifier des relations de superpositions entre les terrains de vie lorsqu'ils partagent une entité commune.
-
Si les participant.es s’accordent sur le fait qu’ils partagent une entité identique, ils se relient grâce à un fil de laine plus épais.
"Et évidemment « chacun pour soi » n’a rien d’individuel. C’est un point capital que nous tirons, intellectuellement, de la lecture des pragmatistes comme John Dewey, mais dont nous vérifions la pertinence : si chacun décrit son concernement, son souci, c’est bien, au début du moins, un souci personnel mais il ne tarde pas à interférer, à s’interconnecter avec celui des autres participants. Il est personnel, mais il n’est pas individuel. L’expression consacrée est, selon le proverbe, que « seul celui qui a un caillou dans sa chaussure est à même de pouvoir l’enlever ». Ce qui compte dans l’exercice ce n’est pas ce que vous pensez en général, mais quel est votre caillou ? Où fait-il mal ? Comment l’enlever ? En délaçant quelle chaussure ?
Et aussitôt commence ce que Dewey appelle l’enquête et qui est au cœur de notre dispositif. En effet, au début, quand chacun rédige son concernement en quelques paragraphes, les entrées sont très rudimentaires et toutes incommensurables — au sens propre, elles n’ont pas de mesures communes et il faut se garder d’en chercher une artificiellement. C’est en recommençant l’exercice, de session en session, au fur et à mesure que l’enquête se poursuit, que le souci s’affine et que, inévitablement, les différents récits interfèrent les uns avec les autres."
Bruno Latour